• Droit,

[Retour sur la Nuit du droit 2023] La justice restaurative : trouver l’apaisement par le dialogue entre personnes condamnées et victimes

Evènement | 16 février 2024

Article réalisé à l'issue de la table ronde " la justice restaurative : trouver l’apaisement par le dialogue entre personnes condamnées et victimes" le 4 octobre 2023 dans le cadre de la Nuit du droit à l'Université Jean Moulin Lyon 3.

Nuit du droit - La justice restaurative

Patrick Mistretta, professeur de droit pénal à l’université Jean Moulin Lyon III était l’animateur et modérateur, avec auprès de lui cinq intervenants qui ont, par le biais de leurs expériences professionnelles, participé à un débat entrecoupé de scènes du film de Jeanne Herry : « je verrai toujours vos visages ».

Les intervenants présents : Geneviève SEGUIN-JOURDAN (référente dans le cadre de l’expérimentation) - Avocate au Barreau de Lyon ; Jean-François BARRE – Vice-bâtonnier au Barreau de Lyon ; Sophie MURACCIOLE – Première Vice-présidente du tribunal judiciaire de Lyon ; Déborah CAICEDO – Assistante coordinatrice de l’antenne sud-est de l’institut Français pour la Justice Restaurative ; Ana DE CASTILLA et Fabienne DUPLAT (animatrices, médiatrices et juristes formées à la justice restaurative) - Juristes de l’association d’aide aux victimes d’infraction pénale VIFFILAVI.

Cela fait plus d’une vingtaine d’années que l’on parle de justice restaurative. Intégrée en France grâce à la fameuse loi Taubira en août 2014, elle se définit comme un espace confidentiel de parole et d’échange entre l’auteur et la victime mais également l’entourage des personnes concernées. Elle peut intervenir à tous les stades de la procédure et peut être arrêtée à tout moment. C’est donc une démarche personnelle qui nait de la volonté de la victime. Puisqu’elle est indépendante de la procédure pénale, son contenu n’est donc pas communiqué au juge.

Comment l’avocat se situe par rapport à cette justice ? Maître Jean-François BARRE explique qu’un avocat de par sa fonction et sa mission a déjà un lien direct avec la personne atteinte ou condamnée qui va s’insérer dans le cadre de la justice restaurative. Ce processus fut mis en place en France à titre expérimental en pré-sentenciel (avant l’audience).

Quelle a été le défi en 2014 ? Pour maître Geneviève SEGUIN-JOURDAN, cela était de trouver un cadre sécurisant pour mener à bien l’expérimentation. De ce fait, la rencontre devait se faire dans un endroit qui se voulait neutre. Comme dit précédemment, le tiers indépendant présent lors des rencontres (afin d’apaiser le stress des victimes et auteurs) était un avocat honoraire.

Sophie Murracciole s’est penchée sur la question d’instauration de cette justice restaurative chez les magistrats car le souci dans les audiences est que les personnes concernées n’aient pas assez de temps pour poser toutes leurs questions, celles qui sont différentes de ce que l’on attend d’eux. C’est alors que la justice restaurative rentre en jeu. Il y a eu un sentiment de redevabilité du côté des juges car ils ont eu l’impression d’avoir agi trop tard.  Lors d’un échange judiciaire compliqué dans le cas d’une expérience de justice restaurative menée en 2019, dit-elle, le condamné a quitté la salle de débat par frustration.

Par ailleurs, depuis 2019 à l’association VIFFILAVI, des séances mensuelles d’analyse de la pratique sont organisées afin de pouvoir accompagner au mieux les personnes faisant recours à la justice restaurative. Durant ces séances, toutes les modalités de la future rencontre vont être discutées et par la suite, les personnes concernées vont donner leur consentement (qui peut être levé à tout moment). Les thématiques les plus retrouvées sont les cas de violences sexuelles, violences conjugales, délits routiers.

Néanmoins, il y a des limites au développement de cette justice. En effet, la problématique du financement se pose puisque de nombreux services souhaitent mettre en place ce dispositif mais sont sous-financés voire pas financés du tout. Il y a également un manque d’informations important et, par conséquent, peu de demande pour en bénéficier.