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[Retour sur] Conférence - Humanité/Humanitaire

Evènement | 20 mai 2025
Lundi 20 mai 2025
17h - 20h

Ce mardi 20 mai 2025, les collégiennes et collégiens ont eu l’honneur d’accueillir Mesdames Aurélia Lamiroy et Agathe Schramm, respectivement coordinatrice juridique de la plateforme des Soutiens aux Migrant.e.s et responsable terrain de l’ONG Human Rights Observers. Ces deux femmes inspirantes, de par leurs parcours et leurs engagements personnels, ont fait de la problématique du franchissement de la frontière franco-britannique par les migrants leur cheval de bataille.

humanrightsobservers

La manière dont la frontière franco-britannique est abordée

Madame Lamiroy nous a d’abord présenté en quoi consiste exactement la frontière franco-britannique : barrière géographique mais aussi politique, cette frontière est la conséquence de la sortie de l’Union Européenne par le Royaume-Uni et de sa non-adhésion à l’espace Schengen.

Si la ville de Calais est aujourd’hui connue par l’opinion publique comme la ville dans laquelle les personnes essaient de traverser la Manche, des villes comme Dunkerque sont également plébiscitées : on pourra trouver à l’heure actuelle près de 1000 personnes à Dunkerque qui essaient de franchir la frontière. Ces êtres humains qui tentent de passer ou qui attendent une régularisation administrative se retrouvent alors sans aucune aide étatique.

On pourra retrouver principalement des hommes seuls majeurs, mais aussi des familles et des mineurs non-accompagnés, de nationalité soudanaise, afghane ou encore érythréenne.

Cette frontière matérielle existe depuis les années 1980, avec un pic atteint en 2016, notamment dans le contexte de la « jungle de Calais ». Ces années 80 voient petit à petit se mettre en place des contrôles aux frontières dans le but de mettre en place les accords de Schengen et ceux bilatéraux conclus entre la France et le Royaume-Uni (accords de Canterbury et du Touquet notamment). Certaines villes deviennent alors des frontières, à l’instar de Paris au départ de l’Eurostar. La personne sera alors contrôlée par l’autorité de départ (ici la France) et elle devra faire sa demande d’asile dans cette autorité.

La France devient alors le « chien de garde » du Royaume-Uni et mène une politique intérieure de dissuasion et d’hostilités. Les politiques locales sont d’ailleurs assez virulentes, avec des expulsions et un refus d’octroyer de l’aide étatique aux personnes se trouvant à la rue.

Néanmoins, la France mènera une politique d’accueil à deux reprises : en 1999 avec l’instauration d’un campement à Sangatte, fermé en 2002 ; ainsi qu’en 2016 avec la tolérance de l’installation durable de campements autour de Dunkerque, dans le contexte de la grande jungle de Calais.

Depuis, la politique intérieure menée est celle de l’invisibilisation.
 

Les outils de contrainte utilisés par les pouvoirs publics

Depuis une trentaine d’années, on trouve une multitude de dispositifs empêchant les personnes de s’installer durablement à la frontière : les politiques d’expulsion (la plus exploitée) et de dissuasion, les pratiques tolérées d’atteintes aux droits. Cette politique d’empêchement est d’ailleurs revendiqués par les pouvoirs publics nationaux et locaux. Ainsi, rien qu’en février 2025, les forces de l’ordre ont procédé à 18 expulsions, même pendant l’ouverture du plan grand froid.

Madame Schramm divise ce régime en deux procédures d’expulsion : les expulsions sur décision de justice qui doivent être motivées sur le fondement du contrôle de proportionnalité de la mesure. Les procédures de flagrance pénale, deuxième outil juridique d’expulsion, sont également un moyen de contournement de la procédure administrative. Les forces de l’ordre peuvent également procéder à des saisies de biens matériels, qui s’apparentent à des violences policières, tout comme les violences verbales ou physiques et les contrôles au faciès exercés dans la gare de Calais.

Les pouvoirs publics ont également pu développer la stratégie de militarisation du littoral en détruisant les embarcations ou les gilets de sauvetage.
 

Les maigre avancées des associations pour garantir les droits fondamentaux

Les associations présentes sur place essaient de documenter ce qu’il se passe pour mieux dénoncer les pratiques abusives, ce qui peut donner lieu à des contraventions. Elles jouent également un rôle de plaidoyer au niveau national et local, notamment auprès du Défenseur des Droits et de l’ONU. Elles peuvent aussi saisir l’IGPN et l’IGGN dans le cadre de violences policières, ce qui reste à l’heure actuelle un échec puisqu’une seule sanction a été prononcée.

La dernière solution est celle du contentieux devant la juridiction administrative puisque la prise en charge des personnes est une obligation étatique. Cette solution a d’ailleurs pu amener plusieurs succès, notamment l’obtention en 2017 du « socle humanitaire », où l’État a eu l’obligation de mettre en place un système de douche, de toilettes et de distribution alimentaire sur les campements.

Cette frontière franco-britannique représente en définitive un défi majeur, que ce soit pour les pouvoirs publics ou pour les défenseurs des droits humains ainsi que pour les personnes qui tentent de franchir cette frontière, afin de mieux garantir l’accueil et la dignité des personnes, notamment des femmes et des mineurs non-accompagnés.

Marion Houlier, Étudiante en 3e année au Collège de droit

INFOS PRATIQUES

Lieu(x)

Campus de la Manufacture des Tabacs

Type

Actualité net3, A la Une - net3, Conférence

Thématique

Droit